Le secteur agricole au Maroc compte près de 1,5 Millions d’exploitations agricoles, dont la majorité est constituée de petites et moyennes exploitations, pour une population rurale qui représente près de 47% dela population du pays. En effet, ce secteur génère à lui seul entre 35 et 40 % des emplois, soit plus de 4 millions d’emplois. Il s’imprègne aussi de rappeler que 15 millions de personnes vivant dans le monde rural dépendent à 80 % de leurs revenus de ce secteur.
Grâce à une croissance annuelle agricole de 6,7 % en moyenne entre 2008 et 2015, Avec une part de 14% du produit intérieur brut (PIB), soit l’équivalent de 74 milliards de dirhams, selon les chiffres du Ministère en charge du secteur.
L’agriculture, priorité politique pour le Maroc
Après l’indépendance, le Maroc a placél’agriculture au cœur du développement national. Les changements nationaux et internationaux engendrés par la crise et l’augmentation de l’offre commerciale ont permis au Maroc de se tourner vers la transformation agroalimentaire comme chantier d’avenir pour l’agriculture marocaine grâce au Plan Maroc Vert (PMV), une stratégielancé par le ministère de l’agriculture et de la pèche maritime en 2008, fondé sur l’idée d’une segmentation par rapport aux types d’acteurs agricoles, à savoir les grands agriculteurs, d’un côté, et les petits, de l’autre.
Pilier incontournable de l’économie et de la société marocaine,l’importance du secteur agricole n’est plus à démontrer, elle reste une priorité politique et participe au développement de la société marocaine.
Le plan Maroc Vert : la stratégie agricole marocaine
En 2008, le Maroc a adopté le Plan Maroc Vert(PMV), qui a pour objectifs, de développer et de moderniser l’agriculture du Royaume en ciblant à la fois les exploitations familiales de petite et moyenne taille et les exploitations entrepreneuriales disposant de grandes surfaces, de faciliter l’accès aux capitaux, de promouvoir les investissements agricoles, d’assurer la sécurité alimentaire, de stimuler les exportations de produits agricoles et de valoriser les produits locaux.En quelques années, le Maroc a considérablement augmenté les investissements publics alloués à ce secteur, ce qui a notamment eu pour résultat une hausse des surfaces cultivées. Le plan repose d’ailleurs sur deux piliers majeurs : l’agriculture moderne et l’agriculture solidaire.
justifiant ainsi la mise en œuvre d’importants moyens financiers, institutionnels et managériaux, une amélioration notoire du PIB agricole, des exportations et des investissements privés, une lutte contre la pauvreté à la fois dans les campagnes, mais aussi dans le périurbain défavorisé. En outre, il a contribué au développement de la coopération entre l’Etat et les professionnels de l’agriculture à travers les contrats-programmes, au lancement de projets d’amélioration de l’élevage, à l’intensification de la mécanisation agricole et à la gestion de l’économie de l’eau.
Cette stratégie est déclinée autour de sept fondements:
• Faire du secteur agricole le principal levier de croissance sur les 10 à 15 prochaines années à venir : augmentation du PIB agricole, création de 1,5 Millions d’emplois supplémentaires, amélioration du revenu agricole et accroissement de la valeur des exportations agricoles ;
• Adopter l’agrégation comme modèle d’organisation de l’agriculture : nouveau système de subvention, accès préférentiel au foncier, au financement et aux avantages de l’interprofession, mise en place d’un fonds de garantie de l’investissement ;
• Assurer le développement de l’agriculture Marocaine dans son ensemble sans exclusion : développement d’une agriculture moderne et à haute valeur ajoutée (Pilier I) et accompagnement solidaire de la petite agriculture (Pilier II) ;
• Promouvoir l’investissement privé accompagné de l’aide publique : drainer un investissement annuel de 10 millions de Dirhams autour d’une Offre Maroc ciblée ;
• Adopter une approche contractuelle pour réaliser le Plan Maroc Vert : réalisation de 1500 projets concrets ;
• Pérenniser le développement de l’agriculture : intégration dela dimension «changement climatique » au niveau de la conception des projets, reconversion de près de un Million d’hectares de céréales vers les plantations fruitières qui sont de nature à protéger les espaces agricoles, appui à l’utilisation des systèmes d’irrigation à économie d’eau, appui au développement de l’utilisation des énergies renouvelables ;
• Préparer la refonte du cadre sectoriel : nouvelle politique foncière, nouvelle politique de l’eau, fiscalité, modernisation du marché national, accompagnement, suivi et évaluation.
Les attentes de l’agriculture marocaine ?
Le secteur agricole est l’un des leviers sur lequel les responsables peuvent agir pour réduire la pauvreté et améliorer la situation des populations concernées.
En septembre 2018, l’Etat a fixé trois grandes priorités pour le secteur agricole ; la jeunesse, l’emploi et l’émergence d’une classe moyenne rurale, dans le souci de répondre à un développement social et territorial plus inclusif.
En octobre 2018, le ministre de l’Agriculture a indiqué que le PIB agricole du pays avait augmenté de 5,25% par an en moyenne au cours de la décennie écoulée. C’est bien plus que la croissance du PIB (3% en moyenne) sur la même période. Dans le même temps, la valeur des exportations a doublé bien que la balance alimentaire reste malgré tout déficitaire. Toutefois, des volumes considérables demeurent importés en dépit des records de production des céréales. Par ailleurs, le PMV a permis un regroupement d’agriculteurs et leur organisation dans des systèmes plus performants comme les coopératives ou les fédérations professionnelles. Les progrès techniques sont visibles grâce à des agriculteurs mieux formés partout dans le pays. Les rotations culturales et l’irrigation de précision gagnent du terrain au bénéfice de l’environnement. Selon les autorités marocaines, le PMV a créé environ 340 000 emplois. À moins de deux ans de l’échéance 2020 initialement fixée, le PMV a donc atteint plusieurs objectifs. Bien entendu, tout n’est pas parfait : des objectifs demeurent à atteindre et des disparités territoriales à résorber. Mais le PMV illustre bien la volonté du Maroc de placer le secteur agricole au cœur de ses priorités géopolitiques.
Selon les prévisions de l’Agence pour le Développement Agricole (ADA), à l’horizon 2020, toutes les actions mises en place dans le cadre du PMV devraient permettre de doubler les revenus de l’agriculture et la part du secteur dans le PIB pourrait dépasser les 15%. De grands résultats ont déjà été observés depuis sa mise en œuvre, en l’occurrence la croissance de la production agricole nationale a atteint les 40%.
Quant à la Banque Africaine de Développement(BAD), elle constate que les gains de productivité dans le secteur agricole marocain sont encore faibles malgré le Plan Maroc Vert destiné à promouvoir l’agriculture et à alimenter l’industrie. La gravité des contraintes hydriques affecte la production, et accroît la volatilité des revenus agricoles.
Selon les experts du CMC (Centre Marocain de Conjoncture), qui partage en quelque part le point de vue du Fonds International pour le Développement Agricole (FIDA), la transformation rurale inclusive où, tout le processus d’amélioration de la productivité agricole, d’augmentation des excédents commercialisables, d’élargissement des possibilités d’emploi en dehors des exploitations agricoles et d’un meilleur accès aux services et aux infrastructures, devra être orienté vers l’amélioration des conditions de vie et des moyens de subsistance des populations rurales.
Mesures pour une accélération du développement agricole
Le CMC souligne que «le Plan Maroc Vert (PMV) a permis de confirmer qu’il peut être un levier performant de la croissance économique. Toutefois, les insuffisances dans la mobilisation du potentiel de compétitivité agricole demandent à être comblées. Ainsi, il est temps de passer à une étape supérieure qui consiste à mettre en place un écosystème agricole et agro-industrielconduisant à une meilleure valorisation des filières d’agro business. Cela permettra de renforcer le secteur agricole qui, de par son importance économique et ses ramifications dans le tissu social, demeure le pilier central de l’économie marocaine et la base fondamentale de tout modèle visant un développement durable du pays.
Les défis auxquels est confronté le Maroc sont nombreux, d’où la nécessite de formuler et de mettre en œuvre des politiques adaptées de nature à faciliter l’accès des agriculteurs aux crédits , aux capitaux à plus longue échéance, aux intrants à des prix raisonables, à l’accès aux technologies appropriées, à une infrastructure de communication, aux mécanismes de commercialisation et à un environnementinstitutionnel solide afin d’améliorer la productivité et la compétitivité.
Il est aussi indispensable d’encourager la diversification de production et d’exportations (aussi bien horizontalement que verticalement) pour l’orienter vers des produits nouveaux à plus fortevaleur ajoutée.
*Chercheure au CERSS
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