Salvador de Bahia, le 15 mars 2018 à 10h30
A l’occasion du Forum Social Mondial (FSM) à Salvador de Bahia, Brésil 2018, le Centre d’Etudes et de Recherches en Sciences Sociales a organisé le 15 mars à 10h30, en partenariat avec le Forum Civil Démocratique Marocain, un atelier animé par Mme Samira Dlimi, sous le thème « l’éducation, le savoir, conditions de la justice sociale ».
L’intervenante a soulevé l’importance de l’éducation et du savoir dans la consécration de la justice sociale et la réduction des inégalités en soulignant les contraintes pouvant entraver la réalisation de ses objectifs et ses finalités, en l’occurrence:
– le manque de qualité ;
– la démarche de la suppression de la gratuité de l’enseignement imposée par les bailleurs de fonds (FMI, Banque Mondiale…) en visant d’atteindre des taux d’inscription plus importants aux écoles privées (de12% à 20%).
– les contenus adaptés aux besoins des entreprises se rapportant à la compétitivité et visant des compétences d’employabilité basées sur une technicité des formations répondant aux besoins du marché de travail, par ailleurs, 66% de citoyens marocains ne sont pas satisfaits de la qualité de l’enseignement dispensé, il convient de souligner dans ce cadre que le Maroc a connu environ treize réformes (entre globales et sectorielles )et dont la plus importante se rattache à l’ élaboration de la charte Nationale d’éducation et de formation qui a eu lieu en 1999. Cependant l’analyse de la situation de plus près, montre que les organes de réflexion sont nombreux, mais le problème auquel on fait face se rattache à un manque d’homogénéité autour de la vision à adopter.
Afin de susciter un débat, et de s’ouvrir sur d’autres expériences, Mme Dlimi a évoqué les pistes de réflexion suivantes :
– est ce que les politiques éducatives actuelles visent à réduire la justice sociale ?
– quel enseignement pour demain (public, privé ou à distance) ?
– quel est l’objectif de l’Etat : former un citoyen ou un simple employé ?
– la pluralité linguistique au sein de l’école est-elle devenue un facteur de discrimination sociale ?
Le rapport pouvant exister entre la justice sociale et l’éducation, créé avec l’Etat providence, est un rapport hypothétique qui n’est pas prouvé réellement, en effet, la managérialisation excessive de l’enseignement n’est plus une affaire de société mais d’ingénierie. On engage des générations à des formations professionnelles alors qu’on ne pourrait prévoir les besoins du marché de l’emploi à long terme.
On assiste à une situation paradoxale. On s’inscrit dans une logique de respect des conventions se rapportant au droit de l’accès à l’éducation, alors qu’on s’oriente vers une privatisation de l’enseignement, ce qui creuse d’avantage les inégalités sociales et génère un élitisme sociétal.
L’atelier a connu également une participation intense et riche de l’assistance. Issus de plusieurs pays, les intervenants ont exposé leurs expériences en matière de l’éducation et de la recherche scientifique.
Au Canada l’objectif est d’augmenter le taux de diplômes, à côté d’un enseignement public et privé il existe, également, des écoles autogérées financées par les parents où l’Etat se contente de leur assurer les locaux. Selon l’intervenante, la problématique de l’enseignement se pose au niveau mondial.
Un intervenant kenyan a affirmé que les concepts de qualité et de quantité en matière de l’éducation sont deux paramètres indissociables liés essentiellement aux volontés des Etats qui doivent s’en engager d’une manière effective. En effet, sous la domination du système néolibéral ceux-ci sont en compétition continue ce qui entrave l’avènement d’une gouvernance mondiale.
L’expérience du Brésil reflète la violence accrue du système néolibéral. Tandis que les riches reçoivent une formation solide auprès de l’école privée, les pauvres s’orientent vers l’école publique qui souffre d’un manque flagrant de qualité, ce qui leur empêche d’accéder à l’université exigeant un concours dépassant leur niveau.
Selon un intervenant de l’Afrique de l’ouest, le pays souffre des problèmes sérieux se rapportant aux infrastructures et au budget dédiés à l’éducation créant ainsi un élitisme sociétal au profit des riches qui optent pour l’enseignement privé générant ainsi des disparités sociales énormes.
L’atelier a été clôturé par un ensemble de recommandations portant sur les points suivants :
– l’engagement effectif de la part des Etats afin d’assurer un accès équitable à un enseignement de qualité.
– la lutte contre le libéralisme sauvage pouvant porter atteinte aux droits humains et au droit à l’éducation en particulier, à travers un militantisme efficient et efficace prohibant la privatisation de l’enseignement et visant la qualité des contenus et des processus de l’opération « enseignement/apprentissage ».
– l’engagement des entreprises citoyennes au financement de la recherche scientifique.
– l’instauration d’une gouvernance mondiale. En défendant globalement les droits de l’homme, on défend, également, son droit à l’éducation et cela peut être décliné au niveau local. Par ailleurs, on ne peut discuter la problématique de l’enseignement sans la mettre dans un contexte mondial où les Etats n’ont que subir les instructions des bailleurs de fonds.
– la société civile doit jouer un rôle constructiviste pour affronter les images sombres de la xénophobie, du racisme et de l’exclusion qui ravagent l’humanité.
– la réforme de l’enseignement est un souci sociétal, seul l’investissement dans le capital humain permettra de réaliser une justice sociale basée sur l’inclusion de l’approche genre, car la femme constitue le premier élément qui souffre le plus des impacts de l’injustice sociale surtout en matière de l’accès à l’école ce qui exige une mobilisation, une conscientisation et une concertation afin de lutter contre ce néolibéralisme dévastateur.
-résister, informer, se former et agir afin de se réapproprier le système de l’éducation et l’orienter vers les attentes de tous et de chacun.
Hind SIYOURI
Echaimae IDRISSI Aicha AIDOUNI
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